29 octobre 2013

Et puis c'est tout.

La mesure de l’amour c’est d’aller droit dans le mur. Sans mesure, en se marrant. L’amour n’a pas de mesure commune au commun des mortels, il se prend à la louche bien plus qu’à la cuillère. Et quelle louche ! On ne parle pas ici d’un simple œil de travers, non, on parle bien d’yeux qui se mêlent le blanc, la pupille et l’âme jusqu’à ses tréfonds et s’en tapent, du regard des autres.

Ne rien dire et parler, toujours un peu plus. L’art de se taire pour tout évoquer, être en chien de mots, et pourtant connaitre l’émoi, le soi et l’autre.  Surtout l’autre. Surtout soi. Mieux se connaitre pour mieux comprendre l’en face. En phase. Le tout sans phrase. Se surprendre, quand on abandonne le silence, à dire les mêmes mots, d’un même sourire. Se comprendre.

Prendre les cons, les éconduire. Savoir choisir. Laisser le destin faire ou le forcer un brin, se foutre une fleur dans le bide pour qu’un papillon s’y niche, et c’est bon. Eviter les chenilles, trop jeunes, ça file des boutons. Les vieux pots, usés, peuvent convenir, pour la bonne soupe, parait qu’il n’y a pas mieux.  Songer toutefois qu’ils trainent parfois des casseroles bien lourdes.

Tambours en poitrines, rythmes décadents à la cadence des hanches, l’amour n’est pas que sentiment. Il faut savoir s’abandonner, donner, recevoir, jusqu’à marcher en canard. S’adonner sérieusement au partage. Terre à terre charnel pour mieux s’envoyer en l’air. Tremper son biscuit n’est pas une hérésie, il faut s’aimer, aimer les truies, haïr, aussi, haimer, allez.

Se transformer, rêver encore, penser beaucoup. Et l’à venir ? Travailler, vivre, ne plus se contenter d’amour et d’eau fraiche. Chaque chose en son temps qu’à la fin elle se casse. La faim ? Toujours, de l’un dans l’autre, sans songer à se barrer, non, jamais. Rester, sourire. Se croire immortels, se croire l’un à l’autre, ad vitam aeternam.

Observer, un peu, parfois, le menu alentour, malgré son régime. Totalitaire. Totalement acquis l’un pour l’autre, causes perdues pour autrui, force de l’habitude. Observer, rêver, savoir que l’habitude n’y est pour rien, que les âmes sont enchainées. Régime volontaire. Sourire à ses rêves, à sa vie, ajouter des fleurs dans son ventre, pour le plaisir des papillons.

Chaud au derrière, chaud devant, partout. Et le froid. N’était-ce pas un regard, là, qui voulait tout dire à un autre que soi ? Ne sont-ce pas des maux qui nous traversent sans crier gare ? Piqûre acerbe de la jalousie, douceur amère de l’appartenance, poison insidieux qui s’en vient dans nos veines. Rien de tel pour faire bouillir le sang, un peu, beaucoup, passionnément, aveuglément.

Souffrir le martyr, souffrir encore, toujours. Mais jusqu’où cela s’arrêtera-t-il ? Agir, enfin. Agir à fond, hurler sa douleur, hurler à la lune, se vider de sa hargne, de sa force, agir et réussir. Bête primale, suante et trébuchante, finir le boulot, dans le sang et les glaires, terminer le travail et sombrer à moitié, dans un rêve, rouge, bruyant.

Découper, trancher, se sustenter. Morceau après bouchée, avaler le gêneur. L’ingérer, le digérer, savourer. Oh, oui. Le sentir en soi, en son ventre, en son sein. Prendre son pied pour mieux le mordre, l’oppresser, l’étouffer… Un cadavre ! Exquis… N’être plus que deux, n’être plus qu’un, n’être plus rien, rien qu’un rêve d’être, rien qu’une espérance, rien…

Se réveiller de son délicieux cauchemar, se réveiller et se découvrir trois. Trio sentimental. Trio charnel. Trois, c’est un de trop, trois, c’est s’effacer, c’est les laisser, c’est s’intégrer, gentiment, doucement. Trois, c’est une place pour chacun, et le regarder. Regarder ce petit troisième qui s’immisce, le regarder et tout lui dire.

Tout. Ne voir que lui, cet être impertinent qui se niche entre soi et son double. Ne voir que lui qui fait tache sur le miroir des âmes. Une tache qui prend de la place, qui envahit et qu’on laisse faire, volontairement. Détacher ses billes des siennes et croiser celles de l’autre, le soi, tout se dire, en un regard, tout savoir. Avoir fait le bon choix. Avoir choisi le bon.

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