17 novembre 2010

Un dernier repas

Les gens l’énervent. Toujours à vouloir se lier d’amitié, discuter, faire dans le communautaire. On aura tout vu ! Et pourquoi pas de l’entraide, aussi ? Et patati et patata et pour se défendre faudrait ça, ou bien… Sociabilité. Non mais vraiment. Elle a une tronche à se faire des potes, la vieille ? Le premier qui dit oui, elle lui arrache la langue. Avec les dents.

Parce qu’elle a faim. De sang. Et elle vient de se trouver une victime. Elle se mêle plus ou moins à la populace, les laisse parler cubes et constructions, constate que ce sont les mâles avec la testostérone en ébullition qui s’acharnent à vouloir faire le plus gros chantier, le plus mieux, celui qui… Et qu’ils jouent à qui a la plus grosse intelligence pour faire le bon choix de la bonne construction.

Elle, elle s’en fout. Elle a trouvé un chat. Elle l’embarque dans le désert, elle veut lui apprendre la vie. Cette nuit, dès qu’Ils ont reflué, elle est sortie. Son futur casse-dalle aussi. Et d’autres. Elle les a accompagnés un temps, souriant à sa proie, aie confiance. Séparation des groupes. Et elle laisse les gens un par un derrière elle, s’enfonçant dans la nuit, seule.

Seule avec un Minou pas rassuré. A se demander qui d’elle ou de la nuit il craint le plus. Elle le rassure longuement. Elle creuse. Et dans la nuit, le hasard, car il fait bien les choses, le rapproche de sa proie. Il semble aux aguets, dans le doute elle envoie le chat. Il regarde la bête avec un sourire qu’elle ne voit pas. Elle lui en offre un deuxième, de sourire. Sans crier gare, ce qui aurait été débile puisqu’elle se voulait discrète.

Le sang coule de la gorge béante, le corps s’effondre, à genoux. Elle appose ses lèvres sur la plaie, buvant l’hydromel à la source. Quand le flot est moins fort, elle allonge le cadavre encore chaud et entame sa découpe. Quelques bouts pour son félin complice et elle entame son festin. La viande n’est pas trop filandreuse, elle est fière d’elle. Elle sait encore choisir.

Heureusement. Parce que ses cheveux ne sont plus si bruns qu’avant, et ses dents plus aussi présentes. Elle est vieille. Et s’est encore bien rempli la panse. Et la lune rousse, qui surgit de derrière les nuages, donne à cette folle aux cheveux en épis épars et à la peau carminée par le sang, des allures de diable. Lorsqu’elle se retourne pour voir ceux que son festin a attirés, Babette éclate de rire. Sur elle, Ils vont se péter les dents, c’est sûr !

4 commentaires:

Castor tillon a dit…

Ouaiiiiiiiiiiiiiiiis ! Une goule, une classique, une vraie de vraie qui arpente le désert pour bâfrer ses proies !
Je n'ai pas vu le film "le festin de Babette", j'espère que je n'ai pas loupé quelque chose.
Tu es aussi à l'aise dans le casse-croûte sanguinolent que dans le récit de vie quotidienne.
Et ceux que ça dépaysera retrouveront le doux ronron des six petits paragraphes de quatre ou cinq lignes.
Espérons que Babette nous laissera un bout de Yunette.

Castor tillon a dit…

et peut être quelques autres... qui sait ?

Chrysopale a dit…

Okayy... classé quantième c'ui là?

Yunette a dit…

Sais pas, c'était un concours sur un jeu de ZZ... en attente, plus de 400 textes envoyés, parait ^^

Justement, le Festin de Babette, je me félicite d'avoir pu le caser dans un texte comme ça ^^