6 novembre 2010

Si peu.

Fille d’elle. Tu ne pouvais qu’être fille d’elle. Cette manière de te mouvoir, de me sourire sans me voir. Enjouée un instant et si… Si. Tu étais cela. Si. Je ne savais rien de toi sinon que tu étais fille d’elle. Une enfant à la voix douce, une larme sur ma joue. Tu étais sienne. Tu lui ressemblais. J’ai aimé la voir en toi. J’ai aimé. Je t’ai aimée car tu étais sa fille. À elle.

Étonnant sentiment que celui que tu m’inspires. Une douceur d’interdit qui m’emplit l’intérieur. Ta jeunesse teintée de nostalgie. Ton allégresse au goût de meurtre. Suicide-moi mon amour, que je cesse de ne savoir quoi penser. Ou regarde-moi, que je me noie ! Que je disparaisse dans la noirceur de ton regard. Pourquoi tant de fard ?

Mon phare. Ma lumière.  Ma nuit. Mes jours et mes éveils. Mes songes. Tu me portes, me transportes. Comment ai-je pu vivre avant toi ? Sans toi. Je ne pourrai vivre après ton départ. Et pourtant. Pourtant. Tu vas partir, n’est-ce-pas ? Je le sais bien. Je le refuse. Je l’accepte. Je ne peux rien te refuser. Si ? Tu veux que je te parle d’elle ?

Elle. Elle… Elle ! Ta mère. Ta mère était  ma vie. Ma raison de vivre. L’unique, la seule. Battements de mon cœur. Plusieurs. Un seul. Loupés, les autres. Erratiques. Elle me regardait ! Et je ne voyais qu’elle. Tu l’aurais vue ! Un mouvement et je n’étais plus rien. Un regard et je baissais les yeux. Et elle baisait mes paupières. Ta mère.

Tu étais fille d’elle. Substance pure issue de sa chair. Et je baisais tes paupières. Lors qu’elles étaient natures. Tu dormais d’un sommeil paisible. Ta peau était douce. Sans rature. Un nez un peu trop grand. Tu étais fille de lui, aussi. Tu n’étais pas fille de moi. Tu n’es pas fille de moi. Je t’ai vue naitre, pourtant. D’elle. Sortie de cette fille un peu femme. Pas encore vraiment. Et déjà mère.

Je n’étais ni père ni homme. Je t’ai vue grandir pourtant. Je t’ai vue sourire. Le temps passant, suis devenu confident. Fille d’elle. Tu ne l’as pas tuée. C’est lui qui l’a fait. Elle était trop jeune. Pas encore femme, vraiment. Fière, jeune. Belle. Un sourire personnifié. Mon soleil ! Je l’ai déjà dit ? Je radote. Trop vieux pour toi, sans doute.

Tu étais fille d’elle. Elle n’a jamais été ta mère. Partie aux prémices de ta vie. Tu es fille de lui. Tu es de son sang. Mais pas de son esprit. Tu n’es que fille d’elle. Enlève ce fard qui ne te va pas. Souhaites-tu tant ne plus lui ressembler ? Mais tu es fille d’elle ! Son sang coule dans tes veines. Nectar aux douces palpitations. Tu es fille de son sang.

Je t’ai élevée dans son amour. Je t’ai élevée avec mon amour. Celui que je lui porte. Que je voudrais lui porter. Que j’aurais offert aux enfants qu’elle m’aurait donnés. Si. Si… Si tu n’étais pas fille de lui. S’il n’avait pas abusé. Si tu n’étais pas née. Elle vivrait. Belle. Souriante. Elle vivrait. Si tu n’étais pas née. Et ce n’est même pas ta faute.

Innocente. Il ne saurait y avoir de faute. Naissance assassine. Meurtrier aux yeux noirs. Ta voix est sucre sur mes lèvres. Tes lèvres sont soie sur ma joue. Et je râpe cette douceur. Je pique ! Oh, oui. Je pique. Viens petite fille. Viens que je t’enserre. Dans ces bras. Je ne suis pas ton père. Non. Je ne suis pas ta mère. Mais je peux te parler d’elle, encore.

Dors petite fille. Dors. Tu es fille d’elle. Tu lui ressembles. Si proche. Si différente. Si toi. Et tes yeux trop noirs. Je voudrais la voir encore. Je voudrais l’avoir encore. Je me surprends à te vouloir. Non ! Tu es fille d’elle. Tu es fille d’elle. Enfantée, elle a fait. Élevée, j’ai tenté. En sa mémoire. Tu lui ressembles. Trop. Encore du fard. Plus.

Encore du fard. Coupe tes cheveux. Ne touche plus à ses robes qui te vont si bien. Te dessinant un corps si semblable au sien. Une tombée de reins qui, si elle n’était tienne… Qui m’enchante. Une vision plongeante vers ce que je n’ai pas le droit de contempler. Et que je contemple. Tu dors à mes côtés. Premier rendez-vous.

Tu m’as tout conté. Et j’ai repensé. A ces émois. Nos premiers. Et l’imagination à débordé. Je voyais ta mère. Je la voyais. Plus je te regardais, plus je la voyais. Je te serrais dans mes bras. Plus les années passent moins nous sommes éloignés. Quelques petites années.  Pourquoi attendre, hein ? Tu n’es pas ma fille. Tu n’es pas ma fille !

Mes mains sur tes épaules. Mes lèvres sur ta joue. Oui, je pique. Je te respire. Sa robe et son parfum. Je la vois en toi. Je te serre, fort. Ma bouche se pose, une fois, sur ton épaule. Je soupire, je gémis. Je te souris. Elle me manque. Tu lui ressembles. Tu n’es pas elle. Tu es fille d’elle. Un peu fille de moi. Tu es fille de moi. Tu es fille de moi !

Par pitié. Écarte-toi. Que je t'aime comme il se doit. Que je te borde et ne reste pas. Comme il se doit. Comme je le veux. Tu es fille d'elle. Un peu de moi. Si peu. Trop peu. Assez. Toujours comme il faut. Elle était parfaite. Telle toi. Dors petite fille. Petite fille de moi.

7 commentaires:

Lunatik a dit…

Poésie, poésie... et tendresse.
Il a tout à fait sa place ici, ce texte.

Castor tillon a dit…

Je comprends la fébrilité du pauvre homme !
Mais comment fais-tu pour les mettre dans des situations pareilles ?

Ce texte aurait atteint la perfection si tu avais ajouté une ligne au dernier paragraphe^^

Yunette a dit…

Il ne gazouille pas trop ? ^^

Mais la perfection, Castor, je ne veux pas l'atteindre ! (et surtout que je dormais en écrivant la fin... vais voir pour rééquilibrer...)

Et comment je fais ? Ben j'en sais rien !

Castor tillon a dit…

Ne rééquilibre rien, je plaisante.
La vue d'avion est tout-à-fait satisfaisante. Un vrai parterre !

Yunette a dit…

Je ne vous ai même pas dit sur quoi je l'ai écrit, ce texte...

On m'a envoyé ce lien... J'ai ouvert word, et j'ai écrit en écoutant l'album en boucle.

http://www.deezer.com/fr/index.php#music/miles-davis/ascenceur-pour-l-echafaud-100412

Castor tillon a dit…

Miles Davis, le pape de la trompinette, avec cette sonorité impossible à confondre.
Ambiance, ambiance... Attention à la dépression.

Yunette a dit…

Nulle dépression, je vais très bien ! On pourrait difficilement aller mieux ^^